Résumé : Extrait du prologue La fin des serpents Ils venaient de très loin, mais, maintenant qu'ils arrivaient, les années de voyage s'effaçaient déjà de son esprit, remplacées par l'urgence du présent. Sisarqua ouvrit la gueule et tordit le cou ; le serpent de mer avait peine à rassembler ses pensées. Il y avait des années qu'elle n'avait pas complètement quitté l'élément liquide, et elle n'avait pas senti la terre sèche sous son corps depuis son éclosion sur l'île des Autres. Elle était bien loin aujourd'hui du sable brûlant et des eaux chaudes de l'île ; l'hiver tombait sur les épaisses forêts qui bordaient le fleuve, et la berge boueuse sous ses anneaux était dure et abrasive ; dans l'air froid, ses branchies séchaient trop vite. Elle n'y pouvait rien, hormis travailler plus rapidement. Elle enfonça la gueule dans l'énorme rigole et la ressortit pleine d'un mélange d'argile veinée d'argent et d'eau. Elle rejeta sa grande tête en arrière et avala la bouchée crissante, froide et bizarrement délicieuse. Une autre goulée, une autre déglutition, une autre et une autre.